L’impact investing favorisé par la loi PACTE

À l’aube d’une nouvelle année, il peut être utile de rappeler les principales dispositions de la loi PACTE de mai 2019, qui fait évoluer le modèle français des entreprises. Analyse d’Emmanuel Sadorge, avocat au sein du département « Organisations non lucratives Entrepreneuriat social » du cabinet Delsol avocats.

Le modèle français des entreprises a évolué avec la loi du 22 mai 2019, dite loi PACTE (Plan d’action pour la croissance et la transformation des entreprises). Parmi les dispositions hétérogènes de cette loi, certaines encouragent les entreprises à prendre part aux défis sociaux et environnementaux du XXIe siècle.
La stratégie d’investissement qu’est l’impact investing pourrait notamment être favorisée par cette évolution permettant de dégager des critères juridiques, garanties de la poursuite d’objectifs d’impact.

Evolution du droit commun des sociétés : intérêt social et raison d’être
La loi invite toutes les entreprises à s’interroger sur l’impact de leurs activités. Le code civil dispose désormais que : « La société est gérée dans son intérêt social, en prenant en considération les enjeux sociaux et environnementaux de son activité » (art. 1833 du Code civil).
Une société peut désormais préciser dans ses statuts une « raison d’être, constituée des principes dont la société se dote et pour le respect desquels elle entend affecter des moyens dans la réalisation de son activité » (art. 1835 du Code civil).
En matière d’impact investing, la « raison d’être » pourrait constituer une obligation de moyens de remplir des objectifs sociaux ou environnementaux (critère de l’intentionnalité).

Création de la qualité de « société à mission »
À l’instar d’autres pays, la France a créé un statut juridique de « société à mission » (cf. art. L.210-10 à L.210-12 du Code de commerce).
Les sociétés commerciales peuvent se prévaloir de cette qualité lorsqu’elles prévoient dans leurs statuts : une raison d’être, un ou plusieurs objectifs sociaux et environnementaux, une obligation de contrôle interne par un comité de mission, ainsi qu’une obligation d’évaluation externe par un organisme tiers indépendant.
En cas de violation de ces règles, ou si les objectifs ne sont pas respectés, la société ne peut plus faire état de cette qualité et le ministère public ou tout intéressé peut saisir la justice pour faire supprimer cette mention.
Cette qualité impose une obligation de résultat qui pourrait devenir un critère pertinent en matière d’impact investing. Elle peut s’appliquer aux sociétés cotées.

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Société à mission vs économie sociale et solidaire (ESS)
La « société à mission » ne présente pas les garanties offertes par les sociétés relevant du champ de l’ESS. Ces dernières doivent poursuivre une « utilité sociale » définie par la loi, justifier d’une gouvernance démocratique et être soumises à une spécificité lucrative limitée.
Une société à mission qui ne remplit pas les critères de l’ESS ne peut pas obtenir l’agrément « entreprise solidaire d’utilité sociale » (ESUS) qui n’est accordé que si la charge induite par les activités d’utilité sociale de l’entreprise a un impact significatif sur son compte de résultat et si les rémunérations sont plafonnées (art. L.3332-17-1 du Code du travail).
Par ailleurs, les sociétés coopératives constituées sous forme de sociétés anonymes sont expressément autorisées à procéder à des offres au public de parts sociales (art. 11 de la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947), ce qui devrait faciliter le financement de celles qui peuvent ouvrir leur capital (ex : sociétés coopératives d’intérêt collectif).
Dans une logique de stabilisation de l’actionnariat, la loi PACTE clarifie le régime de la « fondation actionnaire » (possédant tout ou partie des actions et la majorité des droits de vote et/ou une minorité de blocage d’une société).
À cette même fin, elle crée également le « fonds de pérennité » permettant de pérenniser l’entreprise mais n’ayant pas un objet d’intérêt général (art. 177 de la loi PACTE).